Déverser l’eau de la mer Rouge dans la mer Morte menacée d’assèchement, pour approvisionner Jordanie, Israël et Palestine en eau dessalinisée… Le projet du gouvernement jordanien qui, cette semaine, a approuvé une première phase de travaux. Technique: puiser l’eau à partir du golfe d’Aqaba (sud de la Jordanie) avant de la dessaliniser dans une usine proche.
«L’eau dessalinisée alimentera alors la ville d’Aqaba, et l’eau salée sera pompée vers la mer Morte», a détaillé Abdallah Nsour M. Nsour, le Premier ministre jordanien.
100 millions de mètres cubes d’eau par an
Le projet permettrait de fournir 100 millions de mètres cubes d’eau par an à la Jordanie, spécialement dans les régions nord qui abritent quelque 500 000 réfugiés syriens. Des quantités moindres seront aussi transférées vers Israël et l’Autorité palestinienne, qui en ont besoin.
Mais l’ONG Friends of the Earth Middle East (FoEME) et d’autres associations écologistes ont appelé les trois gouvernements à rejeter ce projet, soulignant ses risques pour l’environnement.
Selon elles, le fait d’y déverser une trop grande quantité d’eau de la mer Rouge pourrait radicalement modifier la composition chimique unique de la mer Morte, formant des cristaux de gypse et introduisant des éclosions d’algues rouges.
De plus, les nappes phréatiques de la vallée de l’Arava, dans le sud-est d’Israël, pourraient être contaminées en cas de fuite des conduites transportant l’eau salée.
Réserves israéliennes
Le ministère israélien de l’Environnement a émis des réserves demandant la mise en place d’un projet pilote à petite échelle pour évaluer les risques. Mais selon les détracteurs du projet, ce test à échelle réduite ne serait pas à même de révéler la menace de l’ouvrage final pour l’environnement.
Côté palestinien, le projet soulève des oppositions plus politiques, l’Autorité palestinienne exigeant un accès élargi à la mer Morte afin d’y développer ses propres projets en Cisjordanie, occupée par Israël.
«Nous aimerions avoir accès à la mer Morte, pas seulement pour avoir de l’eau et nager dedans, mais aussi pour construire des hôtels et développer une zone touristique », explique Shaddad Al-Attili, chef du Département de l’Eau au sein de l’Autorité palestinienne.
La FoEME a appelé les gouvernements concernés à mettre plutôt en place une combinaison de mesures.
Celles-ci comprendraient recyclage et préservation de l’eau, réhabilitation du Bas-Jourdain et même importation d’eau de Turquie, une des trois options actuellement étudiées par la Banque mondiale pour diminuer le coût financier et l’impact environnemental présentés par le projet «mer Rouge-mer Morte ».
Réfugiés syriens
La Jordanie s’était initialement mise d’accord avec les Palestiniens et les Israéliens pour construire conjointement un canal entre les deux mers.
Mais le coût élevé de cet ouvrage (11 milliards de dollars) a conduit la Jordanie à opter pour le projet alternatif qui doit prendre forme.